Sylvie LOBATO



Sylvie Lobato, 

née à Paris en 1970. Française d'origine espagnole, vit et travaille à Paris.Diplomée de l'EMSAT (Ecole Municipale Supérieure des Arts et Techniques de la Ville de Paris). Section Arts Graphiques. Calligraphie avec Laurent Pfuglaupt. Gravure à l'Ecole Duperré. Sculpture aux Arts Décoratifs de Paris


Evidences incarnées plus que témoignages d'une contingence, les visions
de Sylvie Lobato sont aussi prégnantes et inéquivocables que le regard
humain, point de rencontre suspendu entre sensibilité et intellect.
Comme notre regard - dont mécanismes et motivations sont cachés,
inextricables, dans le "lieu" corps - ses peintures émergent d'une telle
profondeur qu'on est tenté de les assimiler à une conscience
universelle. Ainsi, quand elle peint l'être vivant accroché à de grandes
épingles à nourrice qu'on aperçoit à peine, dérisoires et tragiques à la
fois, elle réinvente la crucifixion, puisque son espace peint peut
appartenir au genre humain tout entier. Elle donne corps à notre
capitulation face à la souffrance, aux horreurs éternels et à la fin.

Cette dimension anti-épique, toutefois, n'est qu'une des facettes de l'oeuvre.
Dans des registres plus doux, bien que non moins prenants, nous
trouvons encore des nus, isolés ou en couple, suggérés et fébriles. Les
corps se perdent dans un tout vibrant, mais l'intensité de la synthèse
picturale les rend vite plus que réels. La lumière transperçant les
couleurs en fait des essences de vie. Dans l'oeuvre de Sylvie Lobato le
corps contient la condition humaine dans ce qu'elle a, peut-être, de
plus extrême, le goût du risque et l'effroi, le rire et la douleur (à
l'instar de ses toreros de sang et de joie...!). Un seul de ces corps
abrite dans l'arcane de ses ombres toutes les vies possibles. Par leur
fragmentation, ces visages ouvrent sur l'infini. Par delà leur
fragilité, ils nous donnent à voir leur double et leur aura. Ils
activent le temps, qui fait son apparition sur la toile tel qu'il est:
imprenable, mobile comme un éclair. La matière couleur met en abîme
la substance de l'homme, ce qui est encore plus saisissant dans les
gazes, où l'atmosphère est en jeu. La sensibilité du peintre, à fleur de
peau, traverse la surface impalpable, se joint à la vie environnante et
engendre une autre vie, qui est l'oeuvre même.  
Luciana Mottola-Colban




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